Voyage en cargo ou l’art de la lenteur

by Camille Delbos

À l’heure des voyages éclair et de tous les possibles, certains aventuriers modernes font voeu de lenteur et s’embarquent sur un porte-conteneurs durant plusieurs semaines. De l’Océan Indien à la Mer Tyrrhénienne, ils expérimentent une autre forme de voyage.

Une traversée en cargo n’est pas une croisière, c’est une expérience nomade pour voyageurs peu ordinaires qui souhaitent redonner de la valeur au temps et à la distance. Ils cherchent à retrouver le plaisir simple de s’abandonner au rêve, à la contemplation et au contentement. Sur le pont, les rôles sont inversés : le sujet du tableau reste imperturbablement immobile tandis que le décor se meut dans une lenteur déconcertante.

A bord, le passager est un invité rare, avec un accès privilégié à cet environnement marin. Il prend part au quotidien des membres de l’équipage de toutes nationalités qui cohabitent durant plusieurs mois. Il se plie aux règles car la traversée n’est pas sans danger, notamment aux abords des zones pirates. Surtout, le voyageur doit savoir s’effacer pour ce qui reste prioritaire : l’arrivée à bon port des conteneurs.

Les journées et nuits sont rythmées par les repas, la routine et les escales qui ponctuent le trajet. A chaque port, des noms enchanteurs. Par manque de temps ou par interdiction, le voyageur ne pourra pourtant que rarement explorer les environs. Cantonné sur le navire, il s’émerveille alors d’un ballet ininterrompu de boîtes métalliques colorées jusqu’alors inanimées, chacune renfermant ses secrets.

Embarquer sur un bateau cargo en tant que passager est choix fort. Celui de l’aventure poétique, d’une esthétique métallique qui se conjugue à la nature et la plongée dans un univers méconnu.

Le photographe a choisi d’utiliser un ancien appareil pour donner un grain particulier à cette série. L’ensemble forme une introduction au Slow travel (voyage lent) par la découverte d’une autre manière de voyager, plus responsable, en prenant le temps de s’immerger dans l’environnement et d’effectuer un retour sur soi.

Camille Delbos